Les méthodes de préservation

Il existe plusieurs techniques de préservation de la fertilité féminine dont les indications seront discutées au cas par cas au sein d'une équipe multidisciplinaire permettant une discussion préalable des indications entre les médecins oncologues et l'équipe du Centre clinico-biologique d'AMP qui assurera la consultation d'oncofertilité. 

Les limites et le choix de la technique la plus adaptée dépendent de nombreux paramètres qui sont présentés ci-après pour chaque méthode (âge de la patiente, situation personnelle, réserve ovarienne, contexte clinique (fièvre, altération de l'état général,...), notion d'urgence, nature et posologie des traitements, ...), d'où la nécessaire prise en charge multidisciplinaire par les équipes médicales. 

Pour en savoir plus, cliquer sur l'un des liens suivants :

> Vitrification ovocytaire : conservation d'ovocytes matures

> Fécondation in vitro (FIV) et conservation embryonnaire

> Conservation de tissu ovarien (CTO)

> Conservation d'ovocytes immatures

> Prévention de la gonadotoxicité par transposition ovarienne

> Prévention de la gonadotoxicité par agonistes de la LH-RH

> Alternatives à la préservation de la fertilité

VITRIFICATION OVOCYTAIRE : conservation d'ovocytes matures

Indications : 

Patientes pubères (en sachant que le recueil ovocytaire nécessite une ponction échoguidée par voie transvaginale).

Avantages : 

Il s'agit ici d'une autoconservation de gamètes matures.

Cette technique fait appel à une cryoconservation par vitrification ovocytaire permettant une "congélation ultra-rapide" des ovocytes (Autorisée depuis Juillet 2011).

Limites : 

L'âge conditionne la  quantité et la qualité des ovocytes de  la réserve ovarienne ainsi que la réponse à la stimulation ovarienne (en général < 37 ans).

Le recueil d'ovocytes matures nécessite une stimulation ovarienne hormonale,  et demande de disposer d'un délai de 2 à 3 semaines avant le début du traitement oncologique. Les protocoles de stimulation ovarienne dans le cadre des cancers hormonaux dépendants seront discutés en concertation avec les oncologues.  Il est conseillé d'éviter une vitrification ovocytaire chez des femmes ayant un antécédent récent de chimiothérapie, en raison des risques mutagènes.  

Les chances d'avoir un enfant après réutilisation d'ovocytes vitrifiés dépendent de l'âge de la femme au moment de la préservation de la fertilité et du nombre d'ovocytes autoconservés. Les chances de grossesse diminuent lorsque l'autoconservation ovocytaire est réalisée après 35 ans.

FIV et CONSERVATION EMBRYONNAIRE 

Depuis le développement des techniques de vitrification ovocytaire, la congélation d'embryon pour préserver la fertilité n'a pratiquement plus d'indications car les taux de grossesse après réutilisation des ovocytes vitrifiés sont similaires à la congélation embryonnaire.
Elle peut  éventuellement s'adresser aux couples ayant déjà un projet parental au moment du diagnostic de cancer et consiste à réaliser une fécondation in vitro pour congeler les embryons obtenus en vue de les retransférer après guérison de la patiente et accord oncologique pour une grossesse.
Le couple doit au préalable être informé des limites éthiques et légales de cette procédure.  
Le transfert ultérieur des embryons sera conditionné par la "survie" du couple. En cas de séparation ou de décès de l'un des conjoints, le projet parental s'arrêterait de par la législation en vigueur, et le transfert ultérieur des embryons deviendrait inenvisageable.

CONSERVATION DE TISSU OVARIEN (CTO)

La cryoconservation de tissu ovarien (CTO) est une technique permettant de cryoconserver un contingent important des follicules de réserve.
Elle est réalisable à tout âge, notamment chez l’enfant et chez la jeune fille pré-pubère.
Une CTO peut être proposée dans certaines indications chez la femme adulte, sous condition d'avoir une réserve ovarienne suffisante (en général avant 37 ans).

Indications :

Patientes ayant une bonne réserve ovarienne (en général < 37 ans), devant recevoir un traitement hautement gonadotoxique ou lorsqu'une stimulation ovarienne pour vitrifcation ovocytaire n'est pas possible

Technique :


 Un bilan de réserve ovarienne préopératoire (échographie, bilan hormonal) est indiqué pour guider au mieux l'information.

La congélation de tissu ovarien nécessite au préalable un prélèvement de tissu ovarien réalisé par  cœlioscopie sous anesthésie générale.

La préparation et la congélation de fragments de tissu ovarien a lieu au laboratoire de biologie de la reproduction. Un examen anatomopathologique de la médullaire ovarienne et d'un fragment de cortex sera réalisé pour recherche de la maladie résiduelle et quantification histologique de la réserve ovarienne.

 Les fragments de cortex ovarien permettent de congeler en grande quantité des  follicules de réserve. En cas de projet parental, il est proposé une autogreffe de tissu ovarien par coelisocopie , en vue de rétablir une fonction ovarienne endocrine et d'obtenir une grossesse.
Dans la littérature, un taux de grossesse de 30% est rapporté chez des femmes ayant eu recours à une autogreffe de tissu ovarien décongelé, avec près de 50% de grossesses spontanées. On note par ailleurs  dans plus de 90 % des cas une reprise d’une activité ovarienne  endocrine dans les 4 à 6 mois après la greffe avec une survie des greffons pouvant aller jusqu’à 5 à 7 ans.
Dans le monde, on compte à ce jour, près de 200 naissances vivantes chez des patientes ayant été greffées après rémission de leur cancer sans augmentation significative du taux de malformations congénitales.
Une alternative à la greffe des fragments ovariens serait de voir aboutir la recherche en folliculogenèse In Vitro, qui consiste en une culture des follicules primordiaux jusqu’au stade d’ovocyte mature. Mais cette technique prometteuse est encore du domaine de la recherche.

Avantages :

- Possible si patiente célibataire ou fille pré-pubère
- Pas de traitement inducteur de l'ovulation, donc pas d'hyperoestrogénie induite
- Tissu obtenu sans délai par cœlioscopie
- Cortex ovarien contenant de nombreux ovocytes immatures moins sensibles à la toxicité d'éventuelles cures antérieures de chimiothérapie 

Limites :

L'âge, qui conditionne la réserve ovarienne (en général < 37 ans).

Il faut informer les patientes que cette technique prometteuse a cependant ses limites avec un  risque théorique de réintroduction de cellules cancéreuses lors de la greffe de tissu ovarien après guérison de la maladie. Ce risque théorique découle de l'observation de cellules cancéreuses dans du tissu ovarien chez des patientes atteintes de leucémie aigüe et nécessite d'être évalué en concertation clinico-biologique avec l’équipe d’oncologie.  Il n'a cependant jamais été décrit de réintroduction de maladie résiduelle après greffe de tissu ovarien chez la femme. Ce risque est surtout discuté pour les leucémies aigues et les neuroblastomes, et semble faible pour les lymphomes non hodgkinien et le sarcome d'Ewing (Dolmans et al. Blood 2010, Meirow et al. 2008, Abir et al 2010). 

La réalisation de techniques visant à conserver tissu ovarien, ovocytes ou embryons est très discutable si le projet thérapeutique inclut une hystérectomie. En effet, l'agence de la Biomédecine n'autorise pas l'exportation de gamètes ou de tissu germinal à l'étranger en vue d'une grossesse pour autrui, et la greffe d'utérus est encore expérimentale.
L'indication de cryoconservation de tissu ovarien  est par ailleurs discutable si une radiothérapie pelvienne à forte dose est associée, car le risque d'échec d'implantation est augmenté en plus du caractère incertain de la réussite de la greffe.

Bibliographie : Roux et al. 2010; Piver 2010 - Donnez et al., 2004 - Dolmans et al. Blood 2010, Meirow et al. 2008, Abir et al 2010. 

CONSERVATION D'OVOCYTES IMMATURES en vue de Maturation In Vitro (MIV)

Indications :

Patientes pubères (théoriquement réalisable chez les patientes pré pubères, mais nécessité de réaliser une ponction ovarienne transvaginale)

Avantages :

- Possible si patiente célibataire
- Pas de traitement inducteur de l'ovulation
- Pas de risque de réintroduction de maladie résiduelle

Limites :

- L'âge, qui conditionne la réserve ovarienne et le nombre d'ovocytes ponctionnables (en général < 35 ans).
- Technique nécessitant une maturation ovocytaire in vitro (MIV), encore peu pratiquée en France. Absence de recul concernant les chances de grossesse après MIV puis congélation de l'ovocyte mature ainsi obtenu; quelques naissances décrites après MIV et cryoconservation ovocytaire (Tucker et al., 1988, Chian et al., 2009).

PREVENTION DE LA GONADOTOXICITE PAR TRANSPOSITION OVARIENNE

Il s'agit de "déplacer" chirurgicalement les ovaires en dehors du champ d' irradiation en cas de radiothérapie pelvienne.

Indications : 

Radiothérapie délivrant plus de 6 Gy au niveau des ovaires chez une femme de moins de 40 ans (selon la réserve ovarienne)

La transposition ovarienne se fait généralement dans les gouttières pariéto-coliques afin de diminuer la dose gonadique reçue à moins de 2 Gy. Elle permet à la fois de préserver une fonction endocrine et de protéger une partie des follicules contre les rayons, mais la protection n'est que partielle. Des grossesses spontanées ou après FIV, avec ou sans repositionnement, ont été décrites suite à cette technique. Certaines équipes proposent d'associer la transposition ovarienne d'un côté et la cryoconservation de l'ovaire controlatéral (Martin et al., 2007).

Risques : 

- Carcinogène (ex : risque de métastase ovarienne en cas de cancer du col)
- Augmentation des kystes fonctionnels de l'ovaire (environ 25 % des cas) (Morice et al. 2000 et 2001).

PREVENTION DE LA GONADOTOXICITE PAR AGONISTES DE LA LH-RH

Actuellement, l'administration préventive d'agonistes de la LH-RH n'est pas recommandée en dehors de protocoles de recherche. De nombreuses équipes ont proposé des traitements adjuvants protecteurs à associer à un traitement anticancéreux dans l'espoir de diminuer l'ovariotoxicité des agents de chimiothérapie. La contraception orale oestroprogestative et les progestatifs n'ont pas d'effet protecteur sue la réserve ovarienne. Malgrè le fait que les agonsites de la LH-RH semblent  diminuer le risque d'aménorrhée chimio-induite, la majorité des études randomisées échouent à montrer un bénéfice à long terme sur la réserve ovarienne et sur la fertilité.
Il n'existe actuellement pas assez d'arguments scientifiques pour proposer les agonistes de la LH-RH en alternative à une technique de préservation de la fertilité  ayant prouvé son efficacité.

ALTERNATIVES A LA PRESERVATION DE LA FERTILITE

La préservation des gamètes n'est pas toujours possible, soit pour des raisons médicales (ex : urgence du traitement anticancéreux, réserve ovarienne diminuée) soit car cela n'a pas été souhaité par la patiente (ex : caractère expérimental des techniques, priorité de la part de la patiente envers les soins pour guérir de son cancer).

Malgré l'absence de préservation des gamètes, un projet parental est cependant possible après rémission et le couple peut être accompagné dans sa démarche.

  • Le don d'ovocytes permet aux patientes souffrant d'une insuffisance ovarienne prématurée d'obtenir une grossesse grâce à des techniques de fécondation in Vitro par les spermatozoïdes de son conjoint. Cette technique d'Assistance Médicale à la Procréation est réalisée au sein de centres d'Assistance Médicale à la procréation agréés et est prise en charge à 100 % par l'Assurance Maladie. Plus de renseignements sur le site de l'Agence de la Biomédecine.
 
  • Le couple peut souhaiter s'orienter vers l'adoption. Plus de renseignements et aide pour les démarches sur www.adoption.gouv.fr


Sources : Références bibliographiques

Dernière mise à jour le 11 mars 2020